Tout d'abord, un très grand merci à tous ceux qui nous ont soutenus via ce blog, à Valence, en Suisse. Tout au long de ces mois, j'ai senti qu'il y avait beaucoup de monde derrière le team. Ca donne du courage pendant les périodes difficiles, de l'énergie quand on en a besoin.
Aujourd'hui, je suis de retour à Valence. Après toutes ces fête en Espagne et en Suisse, l'équipe qui ne participe pas au roadshow en Suisse alémanique et au Tessin, a repris le travail. Nous sommes en train de démonter nos Class America pour pouvoir les ranger dans la base. D'ici à quelques jours tout sera fini et on pourra s'offrir des vacances. J'aurai quelques mois devant moi.
Je vais commencer par aller faire un peu de kitesurf et passer du temps avec mon amie. Puis je me réjouis de pouvoir skier à nouveau dans quelques mois. J'espère vraiment que l'hiver sera blanc.
Côté voile, j'ai quelques projets à court terme. Des régates de quelques jours à une semaine.
Je vais continuer à vivre à Valence, en attendant que les contours de la prochaine édition de la Coupe se précisent. Il y a encore pas mal d'incertitudes quant au lieu, à la date où elle se déroulera. Mais aussi quant aux nombres de bateaux qui seront construits, au nombre de navigants nécessaires. Mais j'aimerais en tout cas beaucoup repartir pour une troisième campagne!
Valence négocie, ses habitants croisent les doigts
05 juillet 2007
Les contours de la 33e édition de la Coupe de l'America ne sont pas encore très clairs. Et la conférence de presse de ce matin de l'organe en charge de l'organisation, ACM, n'a pas permis d'en savoir vraiment plus. Quoi que... Le fait de ne pas avoir pu annoncer où se tiendront les régates est révélateur. Il prouve que les discussions avec Valence n'ont pas encore abouti. Pour la plus grande crainte des habitants de la ville.
On le sait, du côté d'Alinghi, on aimerait pouvoir disputer une nouvelle édition en 2009 déjà. Quelle autre ville que Valence serait capable d'être prête pour cette date? Probablement aucune. Le défi suisse a déjà prouvé sa volonté de rester en Espagne en désignant le "Club nautico espanol de Vela" comme "Challenger of Record", son partenaire dans l'ébauche des nouvelles règles et le représentant des Challengers. On sait également que Valence et sa mairesse ne cessent de faire les yeux doux à Ernesto Bertarelli.
Mais où cela coince-t-il? Selon divers médias, valenciens et internationaux, ce serait une affaire de gros sous. Valence proposerait 90 millions d'euros, ACM en réclamerait 120 millions. L'élargissement du Port nécessaire à la tenue de la course de Formule 1 l'année prochaine, inquiéterait également l'organisateur.
Ici on craint déjà que d'autres villes "rivales" tentent de profiter de la situation pour séduire ACM et par là même voir s'échapper une manne financière considérable. Les noms d'Athènes, Marseille, Dubaï et Trapani circulent.
Le suspense continue. Pierre-Yves Firmenich, président de la SNG (Société nautique de Genève) devrait toutefois pouvoir annoncer le "and the winner is:..." d'ici la fin du mois. Si cela n'était pas le cas, cela signifierait que Valence est écartée de la course.
Infernale cette régate!!!! On commençait à y croire, à cette 5e victoire. On était déjà prêts à fêter. Le vent était fort, les Kiwis avaient une pénalité à effectuer avant de pouvoir franchir la ligne.
Et puis, tout d'un coup, nous avons vu que la bouée météo ne mentionnait plus que 4 noeuds. Cela pouvait très mal finir...
J'ai suivi la Coupe depuis la salle de briefing. La tension était incroyable. Je l'avoue, j'ai cassé des chaises, tellement j'étais tendu. Et lorsque Alinghi a franchi la ligne, j'ai dû demander à mes collègues, si vraiment le drapeau bleu avait été levé.
Enfin, trois ans de travail se terminent sur une victoire. C'est une joie si immense, si intense. Le pire aurait été de perdre après de tels efforts, de tels sacrifices. Ce que les membres de Team New Zealand doivent vivrent maintenant.
Peu après l'arrivée, je suis allé rejoindre les autres membres du Team sur le SUI 100. On a félicité tout le monde, on a ouvert bières et bouteilles de champagne. Puis on est montés sur le podium pour recevoir cette fameuse Coupe.
A ce moment je pense à l'ambiance qu'il doit y avoir en Suisse. Je me réjouis d'avance de la fête qu'il y aura à notre retour à la maison. C'est une joie si intense qu'elle me fera oublier tous les efforts et sacrifices pour parvenir à ce but!
La base d'Alinghi passe par tous les états, avant l'explosion de joie
Match à rebondissements, suspense incroyable. Au final une petite seconde d'avance pour Alinghi et la consécration. Pour beaucoup en Suisse ou à Valence, cette 7e régate a été difficile pour les nerfs. Mais dans le Port, il y a un endroit où la tension était peut-être la plus forte: dans la base d'Alinghi.
Les employés, les familles et leur entourage s'y sont retrouvés pour suivre ensemble cette régate. Tout a été fait en grand. Deux étages ont été aménagés: le lounge au 2e et la terrasse sur le toit où un écran géant diffuse les images.
L'assemblée est quasi uniformément vêtue aux couleurs d'Alinghi. Beaucoup d'enfants d'employés portent des T-shirt avec le prénom de tous les membres du team dans le dos. Certains marins ont préféré assister à ce match avec leurs familles, plutôt qu'entre coéquipiers dans la salle de briefing.
A chaque rebondissement des cris déchirent l'assemblée. "Nooooooooo!" "Go Alinghi, go". La langue anglaise prédomine. La femme d'un des membres du team me confie dans un éclat de rire être superstitieuse et porter les mêmes sous-vêtements à chaque régate...!
Une victoire signifierait beaucoup pour ces personnes. Les familles ont elles aussi leur part de sacrifice et d'effort, elles qui vivent au rythme des régates et des performances du team. Mais une victoire signifierait également la poursuite de l'aventure et probablement un emploi ici à Valence ou ailleurs en Europe si la Coupe déménage. La fin ou le début de nombreuses incertitudes.
Lors de la dernière descente sous le vent, Alinghi a course gagnée. Les marins présents se préparent à rejoindre leurs coéquipiers à bord du SUI100. On prépare les drapeaux. Mais même si l'atmosphère commence à se détendre, ici on sait que la course n'est vraiment gagnée que la ligne d'arrivée franchie.
Un tangon cassé et des cris de désespoir retentissent.... "Non c'est pas possible!!!!!". La tension est à son paroxysme.
Quelques dizaines de secondes plus tard: des cris de joie, les gens se sautent dans les bras, des cloches résonnent dans l'assemblée. Une femme n'arrive pas à contenir ses larmes. C'est fait; Alinghi remporte sa 5e victoire.
Toute la tension de cette course et probablement de ces 4 années de préparation s'évacue. Les gens se lâchent. On sabre le champagne, on crie, on danse au rythme de la musique des Red Hot Chilly Peppers.
Dans le Port de Valence, il y a de grands contrastes entre les quelques 500 bateaux amarrés dans la nouvelle Marina. Certains sentent l'aisance et le luxe loin à la ronde, d'autres sont de simples bateaux de passionnés.
Il y a par exemple ce couple de Bordeaux, avec leur fils adolescent. Ils ne loupent pas une régate, depuis leur bateau à moteur. "C'est un événement incroyable. Mon mari et mon fils regardent la course depuis le poste de gouvernail et je leur donne les écarts, assise devant mon poste de télévision", nous explique Madame. Ces Français ont réservé leur place d'amarrage il y a longtemps déjà. "Cela nous a coûté un tarif exorbitant: 4000 euros depuis le mois de mai, jusqu'à la mi-juillet. Et c'est un tarif préférentiel....". Cette dame nous explique qu'une place en Espagne dans un port traditionnel revient à environ 10 euros et dans un site privé, à quelque 25 euros.
Et cela se voit que les prix pratiqués en ont retenu plus d'uns. Même pour cette ultime phase de la compétition, il reste encore des places d'amarrage. Beaucoup ont préféré d'autres ports, proches de Valence. Les responsables du Port de la Coupe ont d'ailleurs commencé à solder les places vacantes.
D'autres ont trouvé de meilleurs moyens pour obtenir une place gratuite.
Un sport de milliardaires qui passionne les foules
02 juillet 2007
La Coupe de l'America serait-elle en train de se populariser? En ce qui concerne les audiences télévisées cela semble être le cas. Que ce soit en Suisse romande ou en Nouvelle-Zélande des dizaines de milliers de personnes regardent les régates, assises devant leurs écrans.
En Suisse romande, le taux d'audience des 6 premières régates ressemble à s'y méprendre à celui enregistré lorsque Roger Federer est sur le court ou quand la Nati joue.
Dimanche 24, jour de la deuxième régate, 44,7% des téléspectateurs romands regardaient les images de Valence, soit 113'000 personnes, en plein après-midi... Samedi 84'000 personnes ont assisté au 4 à 2, soit une audience de 41,6%.
En Nouvelle-Zélande aussi, les chiffres de l'audimat sont éloquents. Ce pays aux 4 millions d'habitants (et aux 80 millions de moutons, comme les Kiwis aiment le rappeler) est passionné par la voile et le match racing. La programmation des retransmissions en direct entre 1 et 3 heures du matin n'empêche pas l'audience télévisée d'être impressionnante.
Lors de la première régate, le 23 juin, 160'000 personnes étaient au rendez-vous. Un peu moins le lendemain, probablement en raison du match perdu la veille, comme l'explique le NZ Herald. Le résumé des régates proposé par TV1 à 7h00 du matin cartonne, avec des audiences mesurées à 275'000 téléspectateurs.
Mardi 26, les Kiwis sont même 220'000 à regarder Team New Zealand, soit une audience plus importante que pour les All Blacks, engagés dans le tournoi de rugby des Tri-Nations.
Même si le match racing est une discipline complexe, les foules apprécient le spectacle offert. En Suisse romande, le bagou, les explications imagées et la tension créée par Christian Karcher, consultant, mais surtout wincher chez Alinghi, y contribuent probablement. La bonne cote d'Alinghi aussi. Car les Néo-zélandais n'ont pas l'exclusivité du patriotisme, surtout en cas de victoire.
Même si la Coupe de l'America reste réservée à des syndicats au budget colossal, cette année le vainqueur de la Coupe de l'America sera probablement plus fêté à la bière qu'au champagne.
"Gagner la Coupe, c'est un incroyable sentiment de satisfaction"
30 juin 2007
4 à 2... encore un point et le nom Alinghi pourrait être gravé pour la deuxième fois sur l'un des flancs de l'aiguière d'argent. Mais rien n'est fait. Il faudra encore livrer une belle régate face à cette redoutable équipe néo-zélandaise. Le défi suisse y parviendra-t-il demain? A voir dès 14h30 sur TSR2.
En attendant, pourquoi ne pas s'autoriser à rêver à cette nouvelle victoire. Notamment en regardant Grant Simmer, directeur général et coordinateur du design team. C'est sa 7e Coupe de l'America et cette édition pourrait représenter sa 3e victoire. Il était notamment à bord d'Australia II en 1983, lorsque la Coupe à déménagé de continent, après 132 ans sans interruption aux Etats-Unis.
Grant Simmer nous explique ici ce que représente une victoire dans cette Coupe de l'America. Des propos recueillis par Alinghi peu avant le début de la Coupe de l'America:
"C'est un sentiment incroyable de satisfaction. Je suis aujourd'hui bien plus âgé que la première fois que je l'ai remportée. A l'époque j'étais très impressionné par l'événement. Aujourd'hui, j'espère qu'on a un bon team pour y arriver. Cela a été mon job de réunir une équipe gagnante. On a toujours pensé qu'on était assez fort pour y parvenir et j'espère bien qu'on va gagner. Si ça arrive, ce sera incroyablement satisfaisant, parce que j'ai investit beaucoup durant ces années pour les préparer. Ce sera aussi un sentiment de fierté pour notre équipe."
On a mieux navigué aujourd'hui! Cette 6e régate était placée sous le signe de la patience. Nous pensions que la droite était plus favorable. Brad Butterworth a vraiment réussi à rester calme, serein, dans l'attente d'une opportunité de ce côté du plan d'eau. Et nous avons également fait un excellent 1er portant ainsi que de très bons virements.
Mais que cela a été difficile pour les nerfs! Nous étions tous dans la salle de réunion devant les écrans. Quand j'ai vu que nous avions 80 mètres de retard après la bouée au portant, j'étais dépité. Je suis allé prendre une douche, de rage. De là j'ai entendu les cris de mes collègues. Nous avions repris la main, avec 30 mètres d'avance. Incroyable!
Ce soir, nous n'allons rien faire de différent que les autres jours. Demain sera un jour comme les autres. Nous menons désormais 4 à 2, mais rien n'est gagné. Nous avons une balle de match, oui, mais si nous commettons la moindre erreur, TNZ saisira sa chance. Car nous l'avons vu une fois encore aujourd'hui, les Kiwis sont forts, ils ne font que très peu d'erreurs. On en est tous conscients.
Mais nous partirons pour ce 7e match sans pression. Par contre, les Kiwis savent eux que la moindre erreur sera fatale.
Cette fois on va dans la bonne direction. Mais on peut mieux faire encore. Nous nous sommes contentés aujourd'hui de conserver notre avance, sans jouer les bascules de vent en notre faveur. On n'a pas navigué comme dans les livres... mais le principal, c'est que nous ayons réussi à garder l'avantage.
Team New Zealand a débuté la régate avec un vent de gauche de 8 degrés, ce qui est idéal. Nous avons tout de même réussi à garder notre position, même s'ils nous ont poussés hors de la lay-line. Reste qu'on a vu que notre bateau va vraiment très bien.
Et puis le tournant de ce match: TNZ a explosé son spi. En principe cela n'est pas trop grave, mais ils ont pris un temps fou à récupérer la situation. Lorsqu'ils ont envoyé leur 2e spi, il y a eu un problème. Il est possible que le mousqueton du point d'amure ait été mal fixé. On reverra ça demain en détail lors du debriefing.
Cette régate c'est la meilleure réponse à cette tentative de nous destabiliser, ce protêt lancé avant-hier par TNZ. Avant la régate, sur le plan d'eau, nous avons affalé la grand-voile à plusieurs reprises. De quoi prouver, s'il le fallait encore, que notre bateau est tout à fait conforme au réglement. Il est vrai pourtant qu'on le fait rarement comme cela. Pour des raisons de sécurité. Car de cette manière, la grand-voile pourrait en effet lâcher d'un coup et tomber sur quelqu'un. Nous préférons envoyer un équipier en haut du mât afin de mettre une drisse pour effectuer la manipulation.
Ce protêt ne nous a pas minés pour autant. Mais c'est comme ça dans la Coupe de l'America. Chaque occasion est bonne pour tenter de destabiliser l'adversaire.
Dans le Port de Valence, les supporters suisses sont arrivés en nombre depuis le début de la Coupe. Un public habillé aux couleurs d'Alinghi, sans excès. Les supporters de voile ne sont pas des fans de foot. Ils crient leur joie lorsqu'Alinghi gagne, mais sans en faire trop. Au contraire, des supporters kiwis, qui sont eux totalement démonstratifs et exubérants.
Dans cette foule de fans discrets, deux Suisses-allemands sortent du lot. A chaque match, ils sont devant l'un des écrans géants du Port. Et lorsqu'Alinghi effectue une bonne manoeuvre, ou prend la tête de la régate, ils courent, sautent devant les autres spectateurs médusés, brandissant leurs drapeaux et faisant sonner leurs grosses cloches.
Ils sont bâlois, et se sont promis, lorsqu'ils assistaient en 2003 à la fête en l'honneur d'Alinghi, de venir soutenir leur équipe, où que la Coupe se dispute. "Des supporters de base", comme ils se nomment.
L'un d'eux se prénomme Niki. Il est directeur d'un service informatique d'une HES alémanique. Il a tenté de négocier un congé de 3 mois pour venir assister aux régates, mais son chef ne lui a accordé "que" 6 semaines. "Pas mal tout de même, n'est-ce pas?" Interview:
tsr.ch, placé sous la responsabilité de la TSR, met en ligne sur cette page des "blogs" personnels souvent décalés, parfois impertinents. Ces textes proposent des regards subjectifs; c'est un espace de liberté de ton qui ne représente pas le point de vue de telle ou telle émission mais bien celui de son auteur.
La Coupe de l'America vue de l'intérieur
Alinghi arrivera-t-il à remporter pour la seconde fois ce trophée célébrant le meilleur équipage au monde de match racing? Comment est l'ambiance dans le team helvétique? Comment cette compétition est-elle vécue de l'intérieur? Et par les habitants de Valence?
Retrouvez tous les blogs de la rédaction de la TSR, présente à Valence. Découvrez également les commentaires de nos invités, des marins ou spécialistes de la voile.